Phrase-résumée du livre : “Je vous propose cette phrase d’Henri Queuille” comme devise pour notre voyage à la recherche du temps perdu. Elle nous servira d’ancrage pour nous rappeler, comme le dit Nicolas Hulot, que “les urgences finissent toujours par s’éliminer d’elles-mêmes” et qu’in fine, on en revient à l’essentiel : la santé, la nature et l’amour de nos proches.”
Chronique-résumé du livre
Par Gilles Vernet, Tout s’accélère ! Comment faire du temps un allié ?, Eyrolles, 2017, 240 pages.
Préface
Gilles Vernet s’offre une préface de Nicolas Hulot qui le félicite de nous inviter à “retrouver le sens des choses”. Il tend également un pont avec la nature, qui a son propre rythme, et qui, elle-aussi plus que jamais a besoin de temps (par exemple pour laisser pousser les arbres).
L’impossible défi
L’auteur est un ancien trader devenu instituteur suite à une prise de conscience brutale liée à sa mère, atteinte d’une maladie incurable. Avant ce livre, il a réalisé le film du même nom “Tout s’accélère !” salué par la critique dans lequel ses élèves interviennent autour de notre rapport au temps. Il raconte dans ce préambule comment, malgré ce changement radical de vie, il se défend toujours contre la course du quotidien. Ce livre est une quête commune pour chercher à se réapproprier notre temps et favoriser notre bien-être.
Première partie : Ce qui dépend de moi et ce qui n’en dépend pas
Chapitre 1 : Vertigineux
Gilles Vernet nous parle des dégâts psychiques liées à nos rythmes de vies effrénés qui sont constatés depuis une dizaine d’années dont les fameux burn out.
Clairement, nous avons oublié ce qu’est la patience. Attendre… plus qu’agaçant, cela nous est devenu insupportable. Le moindre espace de temps libre, de répit est converti en action. Dans l’accélération, la pause, si précieuse, est évincée de notre quotidien.
On parle souvent d’épuisement des ressources concernant l’environnement. L’auteur met en évidence que nous souffrons du même mal, l’épuisement. Pourtant, nous continuons d’accélérer encore et toujours à titre individuel et collectif.
L’un des premiers vecteurs expliqués dans cette course effrénée et la notion de culpabilité. Pourquoi ferais-je une pause alors que j’ai tant à faire ? Ne pas avoir mauvaise conscience, être décomplexé à l’idée de prendre du temps pour soi pour (enfin) se faire plaisir !
Chapitre 2 : J’ai arrêté de penser
Désormais, nous avons une vision à court terme n’ayant pas le temps de nous poser pour penser, assimiler, digérer, se donner envie de… Pourtant une vision à long terme permet “d’agir en conscience”, de donner du sens à nos actes, à notre vie. L’auteur nous évoque le calme de son chat, sa faculté à ne rien faire contrairement à nous humains qui nous agitons en tout sens.
“ Nous n’entrons plus que rarement pleinement en contact avec le monde qui nous entoure. La vitesse nous maintient à la surface des choses, enfermés dans notre stress avec toutes ces tâches auxquelles il faut penser.”
Plutôt que de chercher à combler les temps calmes par exemple en consultant son smartphone par réflexe, laissons place à la flânerie qui laisse naître des rêves, des idées. Ces instants sont précieux, ils permettent une prise de recul, une maturation, l’occasion de “ranger” ses pensées… Plus que de respecter ces instants off, il est bon de se les réserver, de s’offrir des pauses dans le flux quotidien.
Chapitre 3 : Exponentiel et saturation programmée
L’auteur nous explique la fonction exponentielle qui vise à croître encore et toujours, à aller toujours plus vite. Il la place au premier plan de la saturation mentale que nous vivons. Une tâche participe grandement à cette saturation : le traitement des mails qui s’accumulent dans nos boîtes de réception.
Se fixer des limites apparaît alors comme une solution pour ne plus se laisser porter par la vague de vitesse, trouver du temps et se libérer du poids de cette agitation quotidienne.
Chapitre 4 : Le rêve de toute-puissance
Par notre société de surconsommation, par le tumulte ambiant, nous nous sommes éloignés de la notion de modération. “Hartmut Rosa souligne l’absurdité de cette frénésie de consommation à travers un constat lapidaire : nous n’avons souvent même plus le temps de consommer ce que nous achetons ! “
En ce sens, dans notre surconsommation nous ne réalisons pas à quel point nous produisons de déchets en tout genre. Ce que la nature sait gérer par cycles, nous l’accumulons sans commune mesure. Le temps consacré à la consommation et à internet est de plus en plus important, sans compter celui passé devant la télé.
Choisir. Une piste sérieuse pour sélectionner un programme à la télé sans zapper inutilement, pour se rendre dans un magasin avec un achat précis en tête sans remplir son panier de superflu. Se déconnecter en limitant son temps passé sur les écrans et se limiter dans la consultation de ses mails trois fois par jour sont aussi des options.
Chapitre 5 : Synchronisé et désynchronisé ?
L’auteur pointe du doigt la notion de désynchronisation notamment par rapport aux rythmes naturels. Dans une autre mesure, nous sommes désynchronisés les uns des autres dans l’idée d’inégalités croissantes.
La méditation est un outil précieux pour se relier à son rythme naturel en se synchronisant sur sa respiration.
Chapitre 6 : Toujours plus !
Avez-vous le sentiment d’une insatisfaction permanente ? C’est une des conséquences de la société de consommation. Vouloir acheter toujours plus, sans parfois en avoir les moyens. A-t-on réellement conscience des heures de travail (du temps) que nous consacrons à gagner cet argent si vite redistribué ? De plus, en passant d’un achat à l’autre, nous ne prenons même plus le temps d’apprécier ce que nous avons déjà.
Pour s’extraire d’une “société de l’avoir”, l’auteur nous invite à nous intéresser à ce que sont les gens plutôt qu’à ce qu’ils ont.
Chapitre 7 : Tous en retard par rapport à l’histoire
“Ainsi la machine, agent de notre émancipation terrestre, est devenue sous la pression de l’impératif de productivité l’instrument de notre esclavage temporel.” Désormais, pour décélérer il apparaît essentiel de se déconnecter, de faire usage de la technologie de façon plus modérée. Il s’agit là de “reprendre le pouvoir sur la machine”.
Deuxième partie : Le temps libéré
Chapitre 8 : Machine et dépendances
“En France aujourd’hui 60 % des foyers possèdent au moins six écrans (hors tablettes ou smartphones).” Les écrans focalisent notre attention tout comme celle des enfants. Gilles Vernet met l’accent sur le côté instinctif de cette attention : notre regard est spontanément capté par le mouvement. Les écrans ajoutent à cela le son et voilà notre système attentionnel d’autant plus sollicité.
Le pouvoir des écrans va au-delà. Ils offrent l’impression de se divertir, de créer du lien social… comme si nous nous créions une vie dans le monde virtuel. Une véritable addiction qui, alors que nous en manquons, nous fait perdre un temps précieux ! Ils font partie de ce que l’auteur appelle “les dealers du temps”.
Contre une fuite en avant dans le virtuel, laissons place à la lucidité et reprenons le contrôle sur nos vies en agissant en conscience. Se désaccoutumer des écrans invite à un équilibre émotionnel.
Chapitre 9 : Drogués à l’intensité
Fonctionner à l’adrénaline, à l’urgence quotidienne n’est pas une option à long terme même si cela procure un sentiment de puissance. Le corps et l’esprit s’épuisent. L’auteur fait la différence entre stress et pression.
Hiérarchiser ses tâches quotidiennes, ses priorités (car tout n’est pas important !) et trouver pour chacune d’elle le bon tempo pour les réaliser, les satisfaire est une voie à emprunter. C’est seulement en étant pleinement présent à ce que l’on fait que l’on peut juger du bon rythme et l’adopter.
Chapitre 10 : Ne pas se mentir à soi-même
“Nous voulons profiter de notre temps libre, mais nous ne supportons plus de le perdre. Nous aimerions avoir du temps pour l’essentiel, mais nous consacrons de plus en plus de temps aux écrans.” Prendre conscience de nos contradictions est un premier pas pour les dépasser.
Vitesse et lenteur vont de pair et il est bon de jouer sur l’une et l’autre pour mener une journée sur un rythme équilibré en s’offrant notamment des pauses. Ces moments de ralentissement permettent de se ressourcer, de sortir du flux pour mieux ajuster son propre tempo.
Chapitre 11 : Accepter ses contradictions
Être indulgent avec autrui, une autre piste pour dépasser ses contradictions. “ Là où l’on n’est pas indulgent avec les autres, c’est souvent qu’on ne l’est pas assez avec soi-même. En nous libérant de la culpabilité, l’indulgence nous entraîne doucement vers plus de sérénité et de cohérence.”
Chapitre 12 : Et le corps dans tout ça ?
Notre esprit surchargé par tout ce que nous avons à faire sans compter sur sa mobilisation dans le monde virtuel, prend toute la place. L’écoute du corps et la relation corps-esprit sont mises à mal. La méditation offre des parenthèses de calme et invite notamment à se (re)connecter à son corps, à prendre le temps de l’écouter et donc à le respecter, à en prendre soin. Ecouter son corps et mieux le comprendre, mieux gérer ses émotions, ses ressentis physiques… Méditer est une activité contemplative.
Chapitre 13 : Dans les bras de Morphée
Le sommeil est un facteur essentiel d’équilibre et de régénération. Un sommeil réparateur contre bien souvent l’irritabilité et peut être renforcé par la fameuse sieste. Vingt minutes en moyenne à la mi-journée pour un repos bien mérité qui, c’est prouvé, a en plus des effets bénéfiques sur notre efficacité le reste de la journée. Comme quoi les temps calmes renforcent notre “performance”.
Chapitre 14 : Je suis ce que je mange
“J’ai longtemps été réticent à cette idée pourtant assez logique : ce que je mange contribue à former ce que je suis et ce que je ressens.” La nourriture agit a de multiples niveaux et notamment social en nous amenant à vivre des moments de partage.
Pourtant l’action de manger a perdu pour certains tous les plaisirs qui l’accompagnent. Il s’agirait presque d’une action mécanique, purement fonctionnelle alors qu’elle revêt un caractère beaucoup plus global. Cuisiner, choisir ses aliments et partager un repas autour d’une table, autant d’activités qui méritent du temps. Une question de choix pour leur donner la place qu’elles méritent. En faire de véritables activités plaisir et le moyen de les mettre à l’honneur pour préserver notre bien-être.
Chapitre 15 : Il faut bien que le corps exulte
Gilles Vernet met un point d’honneur à l’amour qui pâtit de la vitesse. L’amour prend du temps…
“Faire l’amour est une des «activités» les plus détendantes et une incontestable source de bonheur.” Faire l’amour ne se limite pas à l’acte lui-même. Le corps retrouve sa juste place. Le couple se renforce dans l’intimité. Les sensations affleurent… Les relations sexuelles régulières allègent l’esprit, renforcent la confiance en soi, le bien-être.
“Dans la relation amoureuse, la tendresse est peut-être aussi importante que le sexe. […] Qu’y a-t-il de plus apaisant que cette douce sensation physique d’être envahi par l’amour ? Ce sont autant d’instants volés au temps. » Se réserver du temps à deux pour se retrouver et se rendre disponible à l’autre, libéré de ses pensées, de ses obligations…
Troisième partie : Faire du temps un allié
Chapitre 16 : Ca prendra le temps que ça prendra
Souvent le fait de bien faire les choses implique de prendre le temps de les faire. L’auteur souligne que la vitesse nuit à notre lucidité et à notre créativité. Et puis il y a autre chose. Le sentiment que tout est “obligations”. Délimiter le superflu de nos priorités est un pas essentiel pour adopter, en fonction, le bon rythme (lent pour ce qui est réellement important).
Chapitre 17 : La loi des cycles
Dans le souci d’une croissance perpétuelle comme solution de survie nous oublions la notion de cycles et leurs bénéfices récupérateurs. “ Chaque cycle alterne invariablement une phase de repos et de régénération, puis une phase de vitesse et de croissance. Il en va de même dans la nature que dans le corps humain. La respiration est le premier de ces cycles, alternant la force de l’inspiration et la décontraction dans l’expiration.”
Prendre conscience des cycles (cycles du sommeil, de l’humeur et autres) et les respecter “c’est accepter le temps tel qu’il se présente à nous dans notre expérience quotidienne et notre fonctionnement corporel.” Gilles Vernet nous invite à nous relier au cycle de la nature qui nous conduit à nous connecter à nos propres cycles. Le cycle du présent, sa “rondeur”, est profondément sécurisante.
Les cycles vont de pair avec l’alternance des rythmes qui permet de mieux gérer son énergie physique et psychique quotidienne. Alterner répit et concentration, pause et action, vitesse et lenteur permet de régulariser son efficacité et son bien-être au cours d’une journée.
Chapitre 18 : En quête de sens
Certains projets nous donne des ailes, portés par l’enthousiasme. Ils font sens pour nous. Trouver du sens dans nos actions par exemple en mettant à l’honneur l’amour, l’altruisme ou encore la gentillesse nous enrichit et renforce notre équilibre. “Le temps devient chemin quand nous savons où aller. »
Chapitre 19 : Temps mort
“ La perspective de notre fin nous pousse à intensifier notre vie, à vouloir la rendre plus dense.” Pourtant, cette conscience peut nous permettre de relativiser notre vie, de prendre du recul et d’avoir plus de détachement vis à vis du superflu et plus d’investissement dans nos essentiels.
Chapitre 20 : La décroissance personnelle
Limiter l’ego et ses effets néfastes sur l’équilibre émotionnel lorsqu’il nous culpabilise à la moindre pause ressourçante, sur la confiance en soi et sur le lien social lorsqu’il se frotte à celui des autres, apparaît essentiel. L’auteur évoque même l’égo surdimensionné de l’humanité qui “impose son rythme à la terre entière”.
La pratique de la méditation est une piste pour mieux gérer l’ego, pour canaliser notre petite voix intérieure en portant son attention sur autre chose, notamment sur notre respiration. La nature a ce pouvoir de dissoudre l’ego en nous. “Contempler un paysage, un cours d’eau, une montagne ou l’océan en mouvement nous ramène au cours naturel du temps et à un sentiment d’appartenance à ce qui a été et sera toujours là.”
Chapitre 21 : Simplifier
Gilles Vernet se rend compte que dans sa quête du ralentissement il a simplifié sa vie. “ Je me concentre sur les priorités et ne culpabilise plus de ne pas pouvoir tout traiter. Je résiste plus souvent à la consommation pour moi ou mes enfants, en sachant qu’à l’impulsion d’achat succéderont inévitablement le sentiment d’encombrement et la nécessité de prendre le temps de consommer le produit. Quand je prends du retard dans la gestion de mes mails, je me dis que je les traiterai quand je pourrai et que de toutes les manières, je ne peux pas absorber leur croissance exponentielle.”
En parallèle de la décroissance matérielle, il indique l’idée de décroissance mentale et notre capacité à tous à se dévouer à une tâche en s’appliquant dans la recherche du geste juste et du bon tempo pour trouver un équilibre harmonieux. Il évoque par ailleurs le changement en cours, la prise de conscience collective portée par des mouvements citoyens et suivie par certaines entreprises (cours de méditation pour les employés et autres). Il nous propose la musique (qui rythme le temps) et l’art pour mieux apprivoiser le temps, nous reconnecter à notre temporalité. “La clé pourrait-il être d’apprendre à mettre sa vie en musique ?”
Critique du livre “Tout s’accélère !”
L’auteur part de questions (nombreuses !) que l’on doit être beaucoup à se poser pour apprivoiser le temps et y répond point par point avec soin tout en proposant des clés pour ralentir chacun à son rythme, chacun à sa façon. Une grande réflexion ponctuée d’exercices pratiques. Un ouvrage complet à expérimenter !
Louis
Bonjour Cindy,
Je ne connaissais pas ce bouquin ! Il a l’air top ! Et cette phrase : « nous n’avons même plus le temps de consommer ce que nous achetons » est tellement vraie !
Quand les gens s’en rendront compte, on aura une décroissance logique qui se développera naturellement ! Très sincèrement, je me demande comment le monde « tient encore debout » avec le rythme incroyable d’aujourd’hui…
Julie
Je n’ai pas eu l’occasion de lire le livre mais j’ai assisté à une projection de son documentaire « tout s’accélère » en novembre dernier.
Ce documentaire m’a énormément remuée et je crois qu’il a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase comme on dit et qui m’a poussée à changer de vie…
Lors de cette projection, j’ai rencontré Florence, qui pour elle aussi, tout allait trop vite et en quelques mois, nous avons monté une association, Chez la bourgeoise d’en face, qui a pour but de « réapprendre à prendre le temps » et qui prône le ralentissement.
J’ai encore moi même du mal à ralentir tout le temps, mais cela fait énormément de bien de prendre son temps. Merci à Gilles Vernet pour ce fabuleux documentaire, je le conseille vivement aux personnes qui vivent toujours trop vite et au final, pourquoi ?
Merci également à Cindy pour ce fabuleux blog que je parcours avec plaisir à chaque fois ! Et à beintpot chez la bourgeoise d’en face ? 😉
laslowlife
Merci beaucoup Julie ! C’est vrai qu’il y a des déclics dans la vie… Parfois c’est un documentaire qui les crée 🙂 Je vais de ce pas découvrir la bourgeoise d’en face vue du net.
Julie PICHET
La bourgeoise n’est que sur FB et IG pour le moment mais un site viendra bientôt… https://www.facebook.com/labourgeoisedenface
Au plaisir de te rencontrer si tu es en Ile de France lors de l’un de nos prochains week end !