Une jeune médecin de l’autre côté du globe

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Julie, jeune médecin, se trouve actuellement en Polynésie française en tant que médecin du travail. Avant cela, elle a participé à une mission humanitaire en Inde. Elle nous raconte cette parenthèse de sa vie à l’autre bout du monde…

Qu’est-ce qui a motivé ton départ vers des missions humanitaires ?
J’ai toujours souhaité faire de l’humanitaire. Depuis toute petite je me tourne vers les autres et c’est ce qui fait mon bonheur. C’est essentiellement ma grand-mère paternelle qui m’a inculquée ces valeurs. Fervente catholique pratiquante, elle me répétait sans cesse « aime ton prochain comme toi-même ». De plus, j’ai toujours aimé voyager, apprendre et découvrir d’autres cultures. Les voyages humanitaires amènent à une réelle intégration auprès des populations locales puisque nous sommes amenés à nous rendre dans des endroits qui ne sont absolument pas touristiques et qui rendent compte de la véritable image d’un pays contrairement aux sites touristiques « flambants » qui ne sont pas toujours le reflet de la réalité. Je n’ai aucunement l’intention ni la prétention d’être une « superwoman » mais simplement d’ajouter une petite pierre à l’édifice. Que ce soit à côté de chez nous ou à l’autre bout du monde, l’essentiel est de faire quelque chose. Ne donne pas de poisson à manger à un nécessiteux mais apprends lui à le pécher. Ainsi chaque personne est capable de transmettre un savoir. Chacun d’entre nous peut se rendre utile à sa manière, selon ses compétences ou ses envies. Grâce à cette association, les équipes se succèdent. Lorsque l’une d’entre elle quitte le pays, une autre arrive pour poursuivre la mission ce qui permet d’assurer la pérennité de nos actions.

Comment s’est passée la mission en Inde ?
Au cours de notre mission en Inde nous sommes allés dans des villages reculés en montagne où l’accès aux soins est souvent difficile voir nul. Les habitants parcourent des kilomètres pour aller au dispensaire le plus proche et les soins prodigués restent précaires. Dans la plupart de ces villages, l’accès à l’eau est possible grâce à un puits situé à l’extérieur. Une fois de plus, les locaux parcourent des kilomètres à pied dans le but de ramener de l’eau pour leur foyer. La mission a duré 15 jours au total. Nous sommes partis avec une association et sur place nous avions un chef de mission et des responsables locaux. Nous étions une petite équipe de 8 personnes et de tout âge. Ce fut une mission variée : réfection des sols de classes dans une école puis dépistage de la Lèpre, soins de pansements en léproserie, consultations médicales en dispensaire et enfin journée d’animation dans un orphelinat.

Comment t’es-tu sentie dans ce pays ?
Je me suis sentie libre, légère et surtout je n’étais plus personne… Juste une inconnue dans un pays lointain, loin des soucis de métropole, coupée de la « civilisation » sans téléphone par l’absence de réseau en montagne et sans connexion internet. J’ai oublié qui j’étais le temps d’un moment pour me concentrer sur la mission et me consacrer totalement à ces gens. Les sourires échangés étaient pour moi de véritables rayons de soleil. J’ai découvert des modes de vie différents. Je m’y suis intéressée et ai tout de suite cherché à m’intégrer en commençant par apprendre quelques mots essentiels dans leur langue pour communiquer lors des consultations. Ces moments de partage sont magiques et nous emplissent d’une véritable joie qui reste bien encrée au fond de nos cœurs. Lorsqu’on rentre en métropole, on revient différent.

En Polynésie, quel est l’objectif de la mission en cours ?
Je suis partie en Polynésie Française pour un poste de médecin du travail. Même s’il est vrai que je suis amenée à me déplacer dans les îles où parfois je suis le seul médecin que les salariés voient et
consultent dans l’année, ce n’est pas réellement en soi une mission humanitaire. Il y a néanmoins beaucoup de misère cachée y compris sur Tahiti car la vie en Polynésie est très chère.

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Qu’apprends-tu jour après jour sur la culture polynésienne ?
Il faudrait bien plus que quelques lignes pour retransmettre la force des mots et des histoires qui m’ont été racontées ici. Actuellement j’écris de ma terrasse, assise à côté d’un Marquisien qui chantent des chansons locales et joue du Ukulélé. Je m’évade en écrivant et en l’écoutant d’une oreille. Cet ami se prénomme Hau Nui, ce qui signifie « grande paix ». Il est guide de randonnée et partage avec émotion sa culture chaque fois que possible et à ceux qui veulent bien l’entendre.  L’alphabet Polynésien ne comporte que 13 lettres et dans chaque mot se trouve une signification forte. Ces 13 lettres seraient une sélection des « tupunas » (les ancêtres) qui à la suite d’un long voyage ont acquis les valeurs fondées sur la paix, le respect et l’humilité. Ainsi, l’alphabet aurait été créé pour qu’aucun mot « négatif » ne puisse être formé.
J’ai rencontré Hau Nui grâce à Moana, une autre guide de randonnée qui est devenue une amie proche. Elle est passionnée de montagne, spécialisée en botanique et se bat pour que la culture polynésienne persiste. Après avoir passé 22 nuits en montagne, dormi dans des grottes, manger ce que la nature leur offrait, péché les chevrettes et même chassé le «pua’a oviri » (cochon sauvage), ils savent à présent comment évoluer sur les sentiers non tracés des vallées de Tahiti. Moana fait partie d’associations culturelles (« Haururu » et « Fafaite ») et m’emmène partout avec elle. Elle me transmet généreusement son savoir.
J’aime discuter avec eux, les écouter me raconter les légendes de l’île avec leurs « tripes » comme ils disent. La montagne est très spirituelle et mystérieuse et si on parvient à la comprendre on peut y ressentir le « mana » (la force) qui règne dans ses vallées.

Le rythme d’une journée est-il plus tranquille dans cette région du globe ?
Le rythme est différent car le jour se lève tôt. Je me lève à 5h du matin et termine mes journées vers 17 heures le soir. Je n’ai pas l’impression de travailler. J’aime mon travail « here taou ohipa » en tahitien et le stress n’est absolument pas le même qu’en métropole. En réalité, je ne ressens aucun stress. Il est vrai que le rythme des îles est tout de même plus serein. Les Polynésiens sont très touchants et souriants. Ce sont des personnes sincères et généreuses. J’aime travailler avec eux.

Personnellement, que t’apporte cette parenthèse ensoleillée ?
Les missions humanitaires, la rencontre de locaux, le partage de leur mode de vie, nous confirment que les valeurs telles que la solidarité, l’entraide, le partage ou encore la famille sont bien plus importantes que le matérialisme et l’envie que génère la société de consommation. Ces gens que nous avons aidés ne m’ont au final pas paru si malheureux. En réalité, ils se suffisent de peu et n’ont pas besoin de plus que ces valeurs. Une belle leçon de vie…
Pour moi le secret du partage est le suivant : oubliez ce que vous savez ou croyez savoir… Ne venez pas en terrain conquis. N’essayez pas de leur imposer votre mode de vie sous prétexte que ce dernier vous semble meilleur que le leur. Laissez vous surprendre, émouvoir… Laissez les vous parler d’eux, de leur histoire et vous comprendrez. Et si vous agissez avec votre cœur ils le sentiront et vous
accorderont leur confiance. Leur générosité vous portera et vous pourrez entrer dans leur vie et échanger avec eux. Ce sont pour moi mes meilleurs souvenirs.

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  1. LEFIEF

    Trop chouette cet article et très belle leçon de vie pour Julie qui ne pourra revenir que grandie de cette magnifique
     » aventure  »

    Bravo à Julie que j adore et que j admire …

    Merci à toutes les deux pour ce moment de partage….

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